Sous les ormes de la ville
L'abbé Lanteny, recteur d'un séminaire de la ville de ***, a écrit une lettre à Mgr Cardinal Archevêque, dans laquelle il se plaignait amèrement de l'abbé Gitrel, professeur d'éloquence spirituelle. Par le biais du Gitrel susmentionné, déshonorant le bon nom du pasteur, Mme Worms-Klavlen, l'épouse du préfet, a acquis les vêtements qui avaient été stockés dans la sacristie de l'église de Luzan pendant trois cents ans et a tapissé les meubles, ce qui montre que le professeur d'éloquence ne se distingue ni par une moralité stricte ni par la persévérance croyances. Pendant ce temps, l'abbé Lanteni a pris conscience que ce berger indigne allait revendiquer à ce moment la dignité épiscopale et la chaire vide de Turkuene. Inutile de dire que le recteur du séminaire - ascète, ascète, théologien et meilleur prédicateur du diocèse - lui-même ne refuserait pas de prendre sur ses épaules le fardeau de lourdes fonctions épiscopales. De plus, il est difficile de trouver un candidat plus digne, car si l'abbé Lanten est capable de nuire à son prochain, alors seulement en multipliant la gloire du Seigneur.
L'abbé Gitrel voyait en effet constamment le préfet Worms-Clavlen et sa femme, dont le principal péché était qu'ils étaient juifs et maçons. Des relations amicales avec un représentant du clergé flattaient un responsable juif. L'abbé, avec toute son humilité, était dans son esprit et savait la valeur de sa révérence. Elle n'était pas si grande - une dignité épiscopale.
Il y avait une fête dans la ville qui appelait ouvertement l'abbé Lanteny un berger digne d'occuper un département vide de Turkuen. La ville *** ayant eu l'honneur de donner un évêque à Turkuen, les fidèles ont accepté de se séparer du recteur au profit du diocèse et de la patrie chrétienne. Le problème n'était que le têtu général Cartier de Chalmo, qui ne voulait pas écrire au ministre des Cultes, avec qui il était en bons termes, et mettait un mot pour le requérant. Le général a convenu que l'abbé Lantaigne était un excellent berger et, s'il était militaire, un bon soldat en sortirait, mais le vieux soldat n'a jamais rien demandé au gouvernement et maintenant il n'allait plus le demander. Ainsi, le pauvre abbé, qui, comme tous les fanatiques, était privé de la capacité de vivre, n'avait d'autre choix que de se livrer à des pensées pieuses et de verser de la bile et du vinaigre dans des conversations avec M. Bergeret, professeur à la Faculté de philologie. Ils se comprenaient parfaitement, car même si M. Bergeret ne croyait pas en Dieu, il était intelligent et frustré. S'étant trompé dans ses espoirs ambitieux, ayant noué le nœud avec une vraie renarde, n'ayant pas réussi à devenir agréable pour ses concitoyens, il se plaisait à faire un petit effort pour devenir désagréable pour eux.
L'abbé Gitrel, un enfant obéissant et respectueux de Sa Sainteté le Pape, n'a pas perdu de temps et a gentiment informé le préfet de Worms-Clavelin que son rival l'abbé Lanten était irrespectueux non seulement envers ses autorités spirituelles, mais aussi envers le préfet lui-même, qu'il ne pouvait pas ne pardonner ni affiliation aux francs-maçons, ni d'origine juive. Bien sûr, il se repentit de son acte, ce qui ne l'empêcha pas cependant de réfléchir aux sagesses suivantes et de se promettre que, dès qu'il obtiendrait le titre de prince de l'église, il deviendrait inconciliable avec le pouvoir séculier, les francs-maçons, les principes de la libre pensée, la république et la révolution. —La lutte autour du département de Turkuen était sérieuse. Dix-huit requérants ont demandé des vêtements épiscopaux; le président et le nonce papal avaient leurs propres candidats, l'évêque de la ville *** les leurs. L'abbé Lanteny a réussi à obtenir le soutien du général Cartier de Chalmo, très respecté à Paris. L'abbé Gitrel, dont le dos n'est qu'un préfet juif, a donc pris du retard dans cette course.
Mannequin de saule
M. Bergeret n'était pas content. Il n'avait aucun titre honorifique et était impopulaire dans la ville. Bien sûr, en tant que véritable scientifique, notre philologue méprisait les honneurs, mais estimait toujours qu'il était beaucoup plus beau de les mépriser quand vous les avez. M. Bergeret rêvait de vivre à Paris, de rencontrer l'élite universitaire métropolitaine, de discuter avec elle, de publier dans les mêmes magazines et de surpasser tout le monde, car il reconnaissait qu'il était intelligent. Mais il n'était pas reconnu, pauvre, sa femme empoisonnait sa vie, croyant que son mari était un cerveau et un imbécile, dont la présence à proximité, elle a été forcée de supporter. Bergeret était engagé dans "Énéide", mais il n'a jamais été en Italie, il a consacré sa vie à la philologie, mais n'avait pas d'argent pour les livres, et son cabinet, déjà petit et inconfortable, a partagé avec son mannequin de saule, sur lequel elle a essayé ses propres jupes de travail.
Déprimé par la laideur de sa vie, M. Bergeret se livrait à de doux rêves d'une villa au bord d'un lac bleu, d'une terrasse blanche, où vous pouviez vous plonger dans une conversation sereine avec des collègues et des étudiants sélectionnés, parmi le myrte, un arôme divin fluide. Mais le premier jour de la nouvelle année, le sort a porté un coup modeste à l'humble latiniste. De retour chez lui, il a trouvé une femme avec son étudiant bien-aimé, M. Ru. L'ambiguïté de leur posture signifiait que M. Bergeret avait fait pousser des cornes. Au premier moment, le nouveau cocu s'est senti prêt à tuer les méchants adultères sur la scène du crime. Mais les considérations religieuses et morales supplantaient la soif de sang instinctive, et le dégoût d'une vague puissante inondait les flammes de sa colère. M. Bergeret a quitté la pièce en silence. A partir de ce moment, Mme Bergeret a été plongée dans l'abîme infernal qui s'est ouvert sous le toit de sa maison. Un mari trompé ne tue pas un conjoint infidèle. Il vient de se taire. Il a privé Mme Bergeret du plaisir de voir sa missus faire rage, exigeant une explication, émanant de bile ... Après, dans un silence de mort, le lit de fer du latiniste a été placé dans le bureau, Mme Bergeret s'est rendu compte que sa vie de maîtresse souveraine de la maison était finie, car le mari excluait le conjoint déchu de son monde extérieur et intérieur. Juste aboli. Un peu de preuve du coup d'État était la nouvelle femme de chambre, qui a amené M. Bergeret dans la maison: une cow-girl du village qui savait cuisiner uniquement du ragoût avec du bacon, ne comprenait que les gens ordinaires, buvait de la vodka et même de l'alcool. Une nouvelle femme de chambre entra dans la maison comme la mort. La malheureuse Mme Bergeret ne supportait pas le silence et la solitude. L'appartement lui semblait une crypte, et elle s'enfuit vers les salons des potins de la ville, où elle soupira fortement et se plaignit de son mari tyran. En fin de compte, la société locale était fermement convaincue que Mme Bergeret était une pauvre chose, et son mari était un despote et un libertin qui maintenait sa famille affamée pour satisfaire ses caprices douteux. Mais à la maison, elle attendait un silence de mort, un lit froid et une idiote de bonne ...
Et Mme Bergeret ne pouvait pas le supporter: elle a incliné sa tête fière vers le représentant de la glorieuse famille de Pouilly et est allée supporter son mari. Mais M. Bergeret était silencieux. Puis, désespérée, Mme Bergeret a annoncé qu'elle emmenait la plus jeune fille avec elle et qu'elle quittait la maison. En entendant ces mots, M. Bergeret s'est rendu compte qu'avec son sage calcul et sa persévérance, il avait atteint la liberté souhaitée. Il ne répondit pas, inclina seulement la tête en accord.
Bague améthyste
Mme Bergeret, comme elle l'a dit, l'a fait; elle a quitté le foyer familial. Et elle aurait laissé un bon souvenir d'elle-même si elle ne s'était pas compromise avec un acte téméraire la veille de son départ. En arrivant pour une visite d'adieu à Mme Lacarelle, elle s'est retrouvée seule dans le salon avec le propriétaire de la maison, qui jouissait de la renommée d'un joyeux combattant, guerrier et embrasseur invétéré dans la ville. Afin de maintenir une bonne réputation, il a embrassé toutes les femmes, les filles et les filles qu'il a rencontrées, mais il l'a fait innocemment, car il était un homme moral. C'est ainsi que M. Lacarelle embrassa Mme Reger, qui prit le baiser pour une déclaration d'amour et lui répondit avec passion. C'est à ce moment que Mme Lacarelle est entrée dans le salon.
M. Bergeret ne connaissait pas la tristesse, car il était enfin libre. Il a été absorbé par la construction d'un nouvel appartement à son goût. Le terrifiant serviteur de cow-girl était compté, et la vertueuse Mme Bornish a pris sa place. C'est elle qui a amené chez le latiniste une créature qui est devenue sa meilleure amie. Un matin, Mme Bornish a déposé un chiot de race indéterminée aux pieds du propriétaire. Pendant que M. Bergeret montait sur une chaise pour prendre un livre dans l'étagère supérieure de la bibliothèque, le toutou s'est installé confortablement sur la chaise. M. Bergeret est tombé de sa chaise et le chien, méprisant la paix et le confort de sa chaise, s'est précipité pour le sauver d'un danger terrible et se lécha le nez confortablement. Le latiniste s'est donc fait un ami fidèle. Pour couronner le tout, M. Bergeret a reçu la place convoitée d'un professeur ordinaire. La joie n'était éclipsée que par les cris de la foule sous ses fenêtres qui, sachant que le professeur de droit romain sympathisait avec le Juif, reconnu coupable par un tribunal militaire, exigeait le sang d'un vénérable latiniste. Mais bientôt il fut délivré de l'ignorance et du fanatisme provinciaux, car il reçut un cours non pas quelque part, mais à la Sorbonne.
Alors que les événements décrits ci-dessus se sont développés dans la famille Bergeret, l'abbé Guitrel n'a pas perdu de temps. Il a pris une part vivante au sort de la chapelle de la Mère de Dieu de Belfort, qui, selon l'abbé, était miraculeuse et a gagné le respect et la faveur du duc et de la duchesse de Bresse. Ainsi, l'enseignant du séminaire devint nécessaire à Ernst Bonmon, le fils de la baronne de Bonmon, qui cherchait de tout cœur à être accepté dans la maison de Bres, mais son origine juive l'empêcha. Le jeune homme persévérant passe un marché avec l'abbé rusé: l'évêché en échange de la famille de Breset.
L'abbé Guitrel fut ainsi devenu Mgr Guitrel, évêque de Turkuen. Mais le plus frappant est qu'il a tenu parole au tout début de la lutte pour les vêtements épiscopaux et a béni les autorités de la congrégation de son diocèse, qui ont refusé de payer les taxes exorbitantes qui leur étaient imposées par le gouvernement, pour résister.
M. Bergeret à Paris
M. Bergeret s'est installé à Paris avec sa sœur Zoé et sa fille Polina. Il a reçu une chaise à la Sorbonne, son article en défense de Dreyfus a été publié au Figaro, et parmi les honnêtes gens de son quartier, il a gagné la gloire d'un homme qui s'est séparé de sa confrérie et n'a pas suivi les défenseurs du sabre et de l'arroseur. M. Bergeret détestait les contrefacteurs, ce qui, selon lui, était autorisé pour un philologue. Pour cette faiblesse innocente, le journal de droite l'a immédiatement déclaré juif allemand et ennemi de la patrie. M. Bergeret réagit philosophiquement à cette insulte, car il savait que ces misérables n'avaient pas d'avenir. De tout son être, cet homme humble et honnête aspirait au changement. Il rêvait d'une nouvelle société dans laquelle chacun recevrait le plein prix de son travail. Mais, comme un véritable sage, M. Bergeret a compris qu'il ne pourrait pas voir le royaume de l'avenir, car tous les changements dans le système social, ainsi que dans la structure de la nature, se produisaient lentement et presque imperceptiblement. Par conséquent, une personne doit travailler pour créer l'avenir de la même manière que les travailleurs de tapis travaillent sur des treillis - sans regarder. Et son seul instrument est un mot et une pensée, sans armes et nus.